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L’humanité s’enivre d’alcool depuis des millénaires. Les bacchanales romaines commencent à dater. De la boisson. Des jeux. Et le système peut rouler de plus bel. Pendant que les foules titubent. En profitent pour faire plus maladroitement tout ce qu’elles n’osent pas faire à jeun. Et se racontent à quel point elles ne sont plus responsables de leurs actes.

Aussi bien dire que boire est un comportement tout à fait banal. Loin d’être marginal. Ou alternatif. La voie de la facilité. De nombreux vidéoclips populaires nous encouragent à nous saouler soir après soir.

«Party everyday. P-P-P-Party everyday !»

Évidemment, questionner l’usage de l’alcool n’est pas considéré comme étant très «cool». On passe rapidement pour un coincé. Comme si la seule alternative à la défonce consistait à siroter des tisanes en chaussettes devant un jeu de Scrabble.

Come on.

Pour éviter les malentendus. Nous ne rejetons pas catégoriquement l’alcool comme certains radicaux, straight edges (ex) ou ex-toxicomanes.

Tout ce que nous voulons.

Tout ce que nous voulons. C’est simplement être capables. Nous voulons être capables à jeun. Être capables de socialiser. De nous séduire. De créer. De nous envoyer en l’air. De nous exprimer. De danser. De groover. De perdre le contrôle. De frôler la folie. Hey loco !

Nous voulons être aptes à faire tout cela. Sans constamment avoir besoin de boisson pour nous faire perdre la tête et nous relaxer un peu les épaules. Toucher à l’abandon engendré par l’intoxication. Sans être handicapés par ses effets secondaires. Sans vivre la chute du retour à la norme. La gueule dépressive de lendemain de veille.

Bref. Nous ne savons pas ce que vous en pensez. Mais nous sommes fatigués de nous sentir incomplets. Si par malheur nous n’avons pas un verre ou une bouteille dans les mains lors d’une soirée.

Les partys sans alcool que nous connaissions ne nous satisfaisaient pas pour autant. Nous avions soif de beaucoup plus de spontanéité. De plus d’écoute. Nous cherchions à créer quelque chose de beaucoup plus viscéral. De beaucoup plus brute.

Simple.
Sauvage.
Décomplexé.

Nous pensons parfois à la quantité inimaginable de temps, d’argent et d’énergie que la jeunesse, universitaire ou non, brûle en buvant de l’alcool. Le loisir par excellence de générations entières. Nous songeons à tout ce que nous pourrions accomplir. Avec tout ce temps. Cet argent. Et cette énergie. Alors que nous sommes au sommet de notre force vitale. Tout ce que nous pourrions accomplir. Si seulement nous avions encore l’espoir que nous pouvons. Engendrer quelque chose de significatif.

Le monde corporatif nous retirerait sans permission toutes ces ressources. Il provoquerait probablement l’insurrection du siècle. Mais non. Les compagnies de bières, grâce à de grandioses manipulations publicitaires, ont convaincu la jeunesse de leur livrer sans résistance. De les sacrifier à perte. En leur promettant joie et coup de foudre. Si seulement elle ouvre la bouteille.

Et la jeunesse tente d’y croire. Jusqu’à ce qu’elle devienne. Quelques années plus tard. Aussi amère que ce qu’elle avale. Une version améliorée de la tristesse (ex) chantait Peter Peter.

Améliorée.

Nous avons soif de quelque chose de tellement plus grand.


* * *


Citation de Stanislav Grof, psychiatre et co-fondateur du mouvement transpersonnel en psychologie, dans Pour une psychologie du futur, 2000 :

«Dans le cas de l’addiction, la cause du problème est une forte aspiration à la spiritualité, associée au fait que le contact avec la dimension mystique n’est pas établi. Il existe de nombreux exemples montrant que sous le désir ardent de drogues et d’alcool existe une aspiration non reconnue pour la transcendance et la complétude. De nombreuses personnes en voie de guérison témoignent de leur quête incessante de l’élément ou de la dimension inconnue manquant à leur propre vie, et décrivent très bien la poursuite frustrante et insatisfaisante de substances, de nourritures, de relations, de biens matériels, ou de pouvoir, qui reflète leur effort constant à vouloir étancher leur soif.

Nous avons discuté précédemment l’existence d’une certaine, quoique superficielle, similitude entre états mystiques et intoxication par drogues dures et alcool. Ces deux états ont en commun le sentiment de dissolution des frontières individuelles, la disparition des émotions perturbantes, et la transcendance des problèmes ordinaires. Bien qu’il manque à l’intoxication à l’alcool et aux drogues dures plusieurs caractéristiques importantes de l’état mystique, comme la sérénité, le caractère sacré, et la richesse des intuitions philosophiques, les points en communs se situant au niveau empirique suffisent à séduire les alcooliques et les toxicomanes. »





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