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L’idée de contre-culture semble tendre naturellement vers l’illégalité. S’afficher contre le paradigme dominant impliquerait de s’opposer à ses lois. Nous ne nous positionnerons pour notre part ni contre la culture en place. Ni contre l’illégalité en soi. Sommes-nous par exemple en mesure de condamner la désobéissance sous un régime totalitaire dont les ordres entraînent la mort de milliers de civils innocents?

Il nous semble toutefois que briser les lois écrites. Ne constitue pas l’unique voie vers la subversion. Écrire un slogan «révolutionnaire» sur le mur d’un édifice public représente pour certains le summum de l’acte contestataire. La nostalgie intarissable de mai 68. Un type de provocation exaltée qui a évidemment comme effet de renforcer les dispositifs de sécurité. Qui à leur tour donne aux «résistants» l’occasion de déplorer notre «état policier». Un jeu de chat et de souris qui coûte bien sûr très cher à tout le monde. Incluant les acteurs du geste initial.

À force de nous regarder un peu plus en face. Nous avons réalisé que d’autres types de lois nous contrôlaient. Souvent de manière bien plus aliénante encore. Le tacite : «Tu n’as pas le droit de t’aimer vraiment.» Par exemple. Ces lois ne se trouvaient inscrites nulle part à un niveau juridique. Elles nous avaient été transmises plus subtilement. Par nos parents. Par nos écoles. Par notre culture. Par Hollywood. Nous pouvions les transgresser sans craindre d’obtenir un casier judiciaire ou de payer une amande. Et pourtant. Nous leur obéissions à la lettre. L’anarchiste et l’homme d’affaire, malgré leurs apparences différentes, se trouvaient tous deux sous leur joug. Et souvent pour des raisons similaires. La peur d’être isolé. Ou du moins. Que leur sentiment d’isolement ne fasse que croître. S’ils osaient se différencier de leurs semblables.

Nous nous sommes donc regroupés. Et nous avons commencé à délaisser certaines lois. Qui ne nous faisaient plus aucun sens. Celle de «Tu dois juger le monde avec les notions de Beau et de Laid». Celle de «Tu dois juger le monde avec les notions de Bien et de Mal». Celle de «Tu dois être le Meilleur». Celle de «Tu dois avoir l’air heureux». Et combien d’autres dogmes qui nous liaient les ailes.

Notre désobéissance engendrait évidemment moins d’éclat médiatique que le fait de saccager un bureau ministériel. Elle nous demandait beaucoup plus d’effort. Elle s’écartait de la voie de la facilité. Elle nous exigeait de réaliser que nous perpétuions nous aussi l’aliénation.

Nous avons constaté que de cette désobéissance allait surgir une autre sorte de force. Surprenante. Qui ne dépend désormais plus de nos «oppresseurs». Pour exister. Nous n’avions plus besoin d’eux. Pour alimenter notre identité de «rebelles».




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