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Dove avançait dans sa campagne Real Beauty. Que seulement 4% des femmes utiliseraient le mot «belle» pour se décrire.

4%...

En écoutant les confidences aux alentours, la situation semble effectivement critique. Et les hommes se trouvent eux aussi de plus en plus alourdis de complexes. Dont l’impératif culturel de la musculature parfaite.

Engendrant sur son passage les nombreuses conséquences que l’on connaît. L’angoisse liée à l’apparence surgit très tôt. Alimentée par les compagnies de cosmétiques qui offrent désormais. Sans gêne. Leurs crèmes anti-âge pour fillettes de 8-12 ans (ex).

Bien sûr, certaines initiatives existent pour encourager une plus grande diversité corporelle. Seulement, elles semblent souvent incapables de voir la beauté d’une femme sans qu’elle soit maquillée. Épilée. Ou sans qu’elle ne sourit. D’autres ont alors recours à la pensée positive pour tenter de se rassurer autant qu’elles peuvent. Les résultats n’arrivent pas à convaincre leur cœur comme l’amour saurait le faire. Reste enfin l’option de se résigner à l’aide d’expressions aux allures «spirituelles». Alors «la vraie beauté est intérieure». Une manière de se dissocier de son corps. Tout en se donnant des airs de sagesse.

En fait, un très grand nombre d’entre nous. Ont été éduqués par des adultes incapables de voir leur propre beauté. Par des parents dont les ancêtres avaient eux-mêmes appris à maudire leur corps. Comme l’encourageait une certaine interprétation de la bible.

Nous venons de tellement loin.

Et malgré toutes nos bonnes intentions. Nous transmettons ce mépris et ce doute persistant à nos enfants. Par le simple fait de leur offrir en cadeau les mots «beau» et «laid». Évidemment, une minorité d’entre eux héritent de la «chance» de correspondre pendant leur jeunesse aux canons de beauté de l’heure. Ils accèdent durant un temps au «club des beaux». Mais leur privilège s’accompagne d’une peur constante de perdre leur titre. Avec l’âge. La prise de poids. Et la maladie. Apparaît alors la possibilité de se charcuter le visage et le corps. À hauts frais. Pour tenter en vain de retrouver leur éclat perdu.

Nous savons bien quant à nous. Que des personnes «belles» et des personnes «laides». Ça n’existe pas du tout. Cette dualité illusoire se trouve supportée par notre culture. Notre langage. Par ceux et celles qui pensent encore que la beauté représente un attribut. Une qualité que seulement certains possèdent. Ceux et celles qui n’ont pas assez eu la chance d’expérimenter dans leur vie. Que la beauté. La beauté surgit plutôt comme un phénomène. Comme la foudre vous savez. Et que ce phénomène peut arriver à tout le monde. Lorsqu’on a le courage de réellement entrer en lien.

Qui ne donne pas l’impression de rayonner au plein cœur d’un coup de foudre? Le charisme. Le charme. Le «swag» irrésistible des amoureux des premiers jours. Des enfants que nous avons tous été. Avant de progressivement nous juger. Nous tendre.

La plupart des humains ont encore terriblement peur de simplement se regarder dans les yeux. Imaginez ce qu’il nous reste à explorer. Retrouver le lien demeure un apprentissage. Il n’y a pas de honte à ne pas avoir appris certaines choses.

En attendant. Étant dans l’incapacité de ressentir la beauté profonde de leur partenaire. Nombreux sont ceux et celles qui se traitent réciproquement comme des objets. Avec cette pression accablante et inutile. De devoir s’approcher des idéaux de l’heure en matière d’image.


* * *


Citation de Paul Zumthor, philologue et écrivain, dans La Beauté, 1992 :

«l’expérience esthétique permet un contact, instaure un face à face, ici et maintenant. Quelque chose devient présent, d’une présence inéluctable, insistante, accablante peut-être ou qui suscite la passion. Cette présence, appelons-la Beauté. Elle est la découverte d’une innocence, inaltérable quoique sans doute blessée, souillée peut-être, mais portant les gages de sa propre régénération. Cette expérience nous situe au premier matin du monde: dans la joie du premier matin du monde.»




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