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L’élan passionné pour la recherche et l’espoir vont ensemble. À quoi bon chercher si nous croyons que plus rien n’est vraiment possible? Ou que nous avons déjà tout essayé? Reste alors à étudier pour les diplômes. Pour obtenir un certain statut social. Ou pour impressionner les amis en déployant nos connaissances lors de nos rencontres.

Il y avait une époque où la recherche suscitait chez les jeunes générations un enthousiasme désormais difficile à imaginer. La science n’avait pas encore donné naissance à la bombe atomique. Et la manipulation génétique. La menace écologique n’allait venir que plus tard. Et puis le capitalisme néo-libéral semblait tout de même moins omnipotent. La pensée draguait encore certains territoires pour espérer se développer.

Aujourd’hui les étudiants à la maîtrise avouent avec une conviction mitigée leurs sujets de mémoire. En anticipant l’incompréhension de leurs proches. Et en doutant de leur utilité réelle une fois sur le marché du travail. La connaissance apparaît comme plus accessible que jamais. Google nous enlève à l’avance l’excitation d’avoir à fournir tout effort pour chercher une réponse. Nous recevons instantanément du prémâché. Seulement le concept même de vérité a éclaté. Et nous avons appris le doute systématique. «Be Stupid» (ex) nous lance la campagne publicitaire de Diesel. Comme si sexe et réflexion s’opposaient. À force d’entendre les «sages» nous dicter que les questions sont plus importantes que les réponses. Nous avons carrément arrêté d’en chercher. Ou si nous le faisons. C’est souvent à des fins utilitaires. Dans l’urgence nerveuse. D’avoir à réparer les erreurs du passé.

Mais nos questions nous hantent malgré tout. Comme plusieurs, nous les croyions insolubles. Inintéressantes. Naïves. Honteuses. Bonnes à cacher sous le tapis de nos divertissements. Jusqu’au jour où nous avons décidé de les prendre comme chemin. Comme manière d’insuffler du sens. La plus banale mais obsédante des préoccupations pouvait se transformer en portail inespéré vers une quête. Unique. Sans avoir besoin d’un laboratoire hi-tech pour autant.

Nous ne nous sommes pas laissés impressionner par toute cette humanité. Par ce panthéon de géants mythiques qui nous avaient précédés. Nous nous sommes dit que nous monterions sur leurs épaules. Pour ne pas prétendre réinventer la roue. Que nous apprendrions d’eux. Et continuerons notre chemin.

À force de lire les biographies de nos idoles. Elles sont tranquillement descendues de leurs piédestaux. Au-delà de leurs inventions. Leurs théories. Leurs performances. Leurs «beaux» discours. Nous avons découvert leur quotidien. Leurs angoisses. Leurs dépendances. Leur soif de pouvoir. Leur difficulté de vivre. D’aimer. Nos idoles étaient loin d’avoir tout vécu. Tout compris. Elles nous avaient laissé matière à approfondissement.

Nous avons réalisé que certains territoires de la recherche ne connaissaient historiquement encore que le balbutiement de leur déploiement. Pourtant des aspects fondamentaux de notre nature humaine. Le corps. Le visage. Et les émotions par exemple. Ne faisaient l’objet d’expérimentations que depuis quelques décennies. La notion d’expérimentation incarnée elle-même. Patientait en attente de plus amples développements. Le long empire de la raison pesait encore lourdement sur nos sociétés spécialisées et bien cultivées.

Nous nous sommes donc mis au travail. Avec tout le sérieux des enfants qui se mettent au jeu. Que nous fréquentions l’université ou non. Que nous soyons jeunes ou vieux. Nous nous sommes mis à chercher. Avec une intensité nouvelle. Une ardeur volontaire. Non pas avec la prétention d’en arriver à trouver une vérité définitive. Mais propulsés par cette soif d’élargir le sens de nos vies. De toucher de plus en plus à cette joie qui surgit. Au moment où les données du savoir. Et de nos histoires. Se relient graduellement les unes aux autres. En prenant racines dans nos corps.




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